LE FEU !

Le feu d’été 1986 !

Notre maison était tout juste terminée. Nous avions choisi le mois d’août pour emménager.

C’était une belle journée, un petit vent chassait les nuages, le soleil tapait très fort, la chaleur était tout juste supportable, nous avions invité des amis pour pendre la crémaillère,

Vers 10 h ma femme me signala une fumée qui s’élevait à l’horizon, sur les hauteurs du Tanneron, pas de quoi fouetter un chat, ‘ Au nom de tous les miens’ avait donné un éclairage dramatique sur ce massif, mais c’était en 1970 et nous avions presque tous oublié cette épée de Damoclès qui planait en permanence sur cette région, et puis les années avaient passé.

Au moment de passer à table l’atmosphère était devenue plus lourde et l’ambiance se teintait d’inquiétude car les fumées plus épaisses et plus importantes se rapprochaient rapidement.

Soudain tout s’accéléra, le dessert n’avait intéressé personne, maintenant des flammes s’élevaient et embrasaient le ciel qui s’obscurcissait, de plus en plus teinté de rouge. Vers 16h, des voisins nous annonçaient que le feu avait traversé la Siagne, ce petit fleuve qui semblait une protection…. Les sirènes d’alarmes retentissaient, celles des pompiers se mêlaient à cette symphonie discordante, la visibilité diminuait, la tension montait….des bruits sourds retentissaient, des bouteilles de gaz sans doute, une odeur suffocante commençait à nous envelopper…..les enfants ne jouaient plus et les parents s’interrogeaient, ma femme me regardait avec inquiétude.

Certains commençaient à se préparer pour partir, mais pour moi il n’était pas question de quitter cette maison…. Pourtant, lorsque je m’approchais du portique des enfants et qu’en me retournant je n’arrivais plus à distinguer la façade, seulement à quelques mètres et totalement enveloppée de fumée et de cendres qui commençaient à tournoyer dans un air qui se réchauffait dangereusement, je dus me rendre à l’évidence et accepter la solution la plus logique….

Les volets fermés et arrosés, des chiffons humides placés sous les portes, des objets personnels, des papiers pris à la hâte, ma femme serrant les filles qui pleuraient……et la voiture s’échappait de cette nuit rougeâtre qui maintenant recouvrait tout et transformait notre décor protecteur en une sorte de danger qu’il fallait fuir.

Les phares ne traversaient que difficilement cette sorte de pluie noirâtre qui enveloppait un ciel absent, nous suivions les voitures de ceux qui avaient fait comme nous, des policiers nous guidaient, les flammes étaient dangereusement visibles, sans qu’on sache à quelle distance elles se trouvaient, le bruit du feu devenait assourdissant, les bouteilles de gaz se manifestaient toujours plus, nous étions dans l’inconnu, sans savoir ce qui se passait vraiment car la visibilité était nulle et qu’il fallait uniquement se fier à ceux qui balisaient la route…..je ne savais plus si j’avais eu raison de partir….

Les dernières maisons du village furent traversées en une vision d’apocalypse, des gens affolés couraient, d’autres pleuraient personne ne savait vraiment ce qui se passait sauf qu’il fallait partir, je me demandais si je n’avais trop tardé à réagir, plus personne ne parlait dans la voiture, chacun espérait secrètement voir enfin la lumière du jour sans être ralenti par un obstacle imprévu …..

Plus d’une heure plus tard nous étions tous chez ma mère, les enfants recommençaient à jouer sur la terrasse et nous écoutions la radio, le seul moyen pour savoir ce qu’il se passait vraiment….

Ce n’est que le lendemain en retournant à notre maison, en voyant tous les dégâts et en prenant connaissance des pertes humaines, que nous avions éprouvé une terrible peur rétroactive !

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.