A un jour près nous étions le vendredi 13 !

« La compagnie indienne à bas coût IndiGo s’est engagée à acheter 180 Airbus A320, pour un montant estimé à 16,4 milliards de dollars. »

Je regarde tranquillement le JT, de la Une, désolé, la deux ne passe pas aujourd’hui. Je suis en train de sucer mes pinces de homard, je parle du décapode à l’armoricaine qui est dans mon assiette, merde, je ne suis pas un acrobate en train d’exécuter quelques figures qui relèvent plus d’une performance osée que d’une tentative de satisfaction sexuelle certes, mais également lubrique, ce qui ne saurait me convenir, surtout comme plat principal, puisque je me réserve ces fantaisies uniquement pour le dessert. Dieu me pardonne, le ravi habituel, entre deux rictus de son sourire conventionnel, vient de faire cette annonce victorieuse à tous les spectateurs passifs qui sont en train d’avaler quelques nourritures toutes aussi spartiates, mais je me fige instantanément, regardant fixement l’écran, tout en finissant d’avaler les quelques substances aromatisées à la tomate avec un léger goût subtil d’armagnac flambé et d’oignons écrasés. Ma femme pense à un malaise. Comme d’habitude, elle est debout à mes côté, je n’aime pas que les serviteurs  s’assoient pendant que je mange, et elle remarque immédiatement la gêne qui m’envahit. Elle se précipite pour mes remplir un verre d’eau que je repousse agacé, merde, je n’aime que l’eau pétillante, putain, elle devrait le savoir. Le temps de changer de verre, j’ai horreur des mélanges, le représentant de commerce est passé à la culture de la mâche en basse Saxe avec son influence radicale sur les joueurs de saxo en Haute-Marne.

Mais c’est inadmissible hurlais-je, effaré, me levant d’un bond aussi svelte qu’imprévisible.

Et je me mets à invectiver mon écran aussi plat que les commentaires du santon.

« Mais c’est impossible de dire de telles conneries » tentant de chercher une approbation tacite de ma femme qui était repartie en cuisine pour finir de dresser le dessert.

« Ne regarde pas à la chantilly «   lui lançais-je dans un dernier souffle avant de reprendre ma respiration.

« Tu peux mettre une boule en plus !  » putain, c’est vrai, quoi, on n’a que le plaisir qu’on se donne !

Merde, nous sommes dans la zone euro, et l’autre qui continue de parler en dollars, merde, déjà que certains se plantaient avec les anciens francs convertis en nouveaux et traduits en euros…………

 Bon, je déconne, mais trouvez-vous normal qu’une puissance mondiale continue d’accepter de faire des transactions en dollars alors qu’elle se targue de vouloir imposer sa monnaie et trouvez-vous normal qu’un commentateur de télé ne fasse point une conversion en euros, merde de merde ?  Je m’en fous du dollar qui ne sert qu’à nous faire payer plus cher l’essence à la pompe.

Putain, il n’y a pas assez de chocolat chaud, tu parles d’un dîner en couple  !

Tout fout le camp, incroyable !